10/05/1998 Vénus Affiche 21.Editions le bleu du ciel.Bordeaux.France
Vénus (Michel Herreria)
Texte Christian Prigent

VENUS AU BAIN

1

Dans la trombe, dans
la baignoire, Vénus
et ses fossettes, ses
plis ou ça luit chute.

On voit son nombril, sa
turpide trousse, la
très petite flûte de
champagne qui mousse
sous son pagne.

2

Puis la voici sur le pliant,
fumante, tout petit fumier,
vapeur fade, goût d’évier.

Une humidité tuméfiée
virgule ses rus, ça sent
le fient d’ange, la fange,
le jus sacripant, la
crème des crèmations,

l’abus charmant,
l’écœurement.

3

Mais découchée des
purulences
elle se dégonfle au four
des rouges,
elle sèche ses bondes,
voici sa gorge furibonde
dans la paille des poussières
intenses.

Et ses chromes publics,
ses
quasi cylindres, ses
gyrophares chassent
la viande fondue, l’âme
vendue au moite,
le goût de la souille.

Salut, éclats peignés !
septique fosse du jour !

l’obscur couve son feu dans
les torchons,
zéro libido sort des lavabos.

VENUS AU MIROIR

Avec sa caisse tavelée d’ocelles, son
aisselle, sa peau de songe où plonge
tout le cadre, et sa douce, sa mousse,
O Glory be to God for cette housse
et l’eau de rose des choses si truitées.

Et si j’ébruite sa longe, sa velure,
complètement jusqu’à la hure,
je viens dans ce miroir et me
souviens d’un dos d’oiseau, du chou
de sa pelure en gloire qu’hume
écume, épaules, nage, plumes.

Alors, ça piaule où sont les chattes
et l’aile hibou qu’exhume,

mère, le vol que fut ton dos.

Voici l’immense, le milan,
dans la lumière en poudre, la couleur,
l’aliment de mille ans
pourri à moudre la douleur.

Elle émeut le remué, le nu,
le cumulus dont tu
chargeas mon derme : touffe
chue, fournie et dénouée, souffle
de tout le cadre rempli de rien,
mâchant le vent, ramant,
ne respirant que seins.

AUTRE VENUS AU MIROIR

1

Dans les tries, ah ! dans
les courbes,
dans le coquillage
de ses pieds, conque,
s’agenouille
l’ange.

Drôle de mélange !

Voici la valve
et qu’elle s’étale, vulve,
jeune vagin,
d’où l’ange doux
(sage, nouille)
se déplie debout et rit :

clitoris.

2

Car c’est pour la sortir, l’a
languie,
du noir,
de l’inertie plombée en bas,

qu’sexe chou s’ouvre et aile
les couleurs : festons rouges,
tonnes de fesses, ru
d’un désir vu

dans le dos de la vue.

3

ça mousse, le ventre, l’eau
de moire miroir,
et toi,
lange,
crème de drap !

fouettée de bulles !
bouillons soufflés !

Et ça monte, cire,
saveur, désir,
va tout noyer,
violent voile,

choyer son corps.